L'origine de cette excursion remonte à une course de kayak entre Forestville et Ste-Luce sur mer. Je n'était pas particulièrement interessé parce que l'on devait se rendre à Forestville en voiture, faire la course, puis ensuite récupérer la voiture. Je ne trouvais pas cela très pratique. J'ai donc eu l'idée de me rendre sur les lieux de la course en Kayak. Je pourrais par exemple partir du chalet de mes parents à l'Anse au Sable, traverser en solitaire et revenir "avec" la course.
J'ai donc décidé de faire de cette idée un projet. J'ai donc acheté les cartes marines de la région, et me suis mieux préparé pour survivre dans l'eau en cas de chavirage. J'ai mis le comité organisateur de la course au courant de mon projet. Les organisateurs n'approuvait pas mon excursion en solo et m'ont recommandé de ne pas traverser à moins d'être accompagné d'un bateau.
J'ai donc décidé de ré-aligner mes flûtes et de couper en deux mon excursion pour me rendre à Forestville. J'ai remarqué que la traversée du fleuve vis-à-vis Trois-Pistoles représente seulement 28 km au lieu des 55 km reliant l'Anse au sable à Forestiville. La première journée, mon plan était de faire la portion Trois-Pistoles/Escoumins et la deuxième journée Escoumins/Forestville. Cette approche était plus conservatrice, même si la distance parcoure était plus grande.
Malgré le peu de support du comité organisateurs et de certaines personnes de mon entourage, je décidais de quitter Trois-Pistoles le 15 août 1996 à 10:10 heure locale, environ au milieu de la marée montante. La journée était superbe, aucun vent avec beaucoup de soleil. Environ 10 km au large de Trois-Pistoles, j'était complètement inondé de baleines. Lorsque j'arretais de ramer, tout ce que j'entendais était des souffles de baleines partout. Il n'y avait pas cinq secondes sans entendre un souffle, c'était assez spécial comme sensation. J'était quand même un peu déçu de ma vitesse moyenne qui était inférieure à ce que j'avais anticipé. Je suis arrivé aux Escoumins quelques minutes avant 17:00. J'était satisfait de ma première journée mais espérait une meilleure vitesse pour le lendemain. La carte indiquait jusqu'à 5 noeuds de courant favorable et je comptait bien être la au bon moment pour l'exploiter.
Levé à 4h00 le lendemain matin, j'étais sur l'eau à 5h25 juste avant le lever du soleil, afin de profiter au maximum des courants descendants. Je m'était entendu avec mon centre de contrôle (ma chère blonde Josée) d'appeler avant 17h00 faute de quoi elle devait contacter la Garde Cotière. Les courants n'étaient vraiement pas au rendez-vous et je commencais à me dire que la journée serait longue. En plus, en bout de trajet j'avais à affronter le courant remontant de la marée. En plus, la température n'était pas très bonne, le ciel était couvert avec un vent léger du nord est. Je m'efforcais de donner coup après coup de rame, tout en me demandant pourquoi le courant n'était pas au rendez-vous. La limite de 17h00 approchais dangeureusement et je me rendais bien compte que je n'arriverais pas à Forestville à temps. Encore une fois, le GPS était très utile pour déterminer tout cela. J'ai donc opté pour arrêter sur la terre ferme pour tenter de faire un contact radio. La terre la plus près était l'île de la barre de Portneuf, une île déserte de sable. Malheureusement, je n'ai pas réussi à rejoindre quiconque avec ma radio amateur. Je devais absolument trouver un téléphone. J'ai vu une batisse isolée à environ 2-3 km et toute autre civilisation se trouvait plus loin. Par chance, j'avais entré le point 0MPORN dans mon GPS pour la marina de Portneuf. Il ne me restait qu'à espérer qu'un téléphone s'y trouve. Je me remis à l'eau pour arriver à la marina environ 30 minutes plus tard. Une seule personne s'y trouvait, sois la propriétaire. J'ai donc pu faire mon téléphone, manger un chip et boire puis repartir pour Forrestville.
Deux heures et demi plus tard, je m'acostais à la plage de la baie verte à Forestville, le glissement de l'étrave sur le sable de la plage était toute une satisfaction. Après près de douze heures et demi de rame dans une journée j'étais très heureux d'arriver.
J'étais passablement fatigué car j'étais sur l'eau depuis 5h25 le matin et il était maintenant 19h00. Pour l'instant il n'était pas question de relaxer car je devais compléter mon inscription à "La grande traversée". Cette course relie Forrestville à Ste-Luce-sur-mer. J'étais quand même satisfait d'avoir atteint mon premier objectif qui était de me rendre à Forrestville en kayak. Ne restait maintenant qu'à compléter la traversée dont le départ était prévu pour 6h00 le lendemain matin. J'étais tellement fatigué à ce moment que j'étais loin d'être certain de prendre le départ.
Finalement une fois tous les préparatifs de la course réglés, le temps de manger et de prendre une douche, je me suis couché vers 23h00. Heure de lever prévue: 4h00.
La petite nuit de sommeil a définitivement fait du bien, mais il était quand même pénible d'enfiler mon "wetsuit" encore mouillé de la veille. Quelques heures plus tard, le coup de canon du départ se faisait entendre. J'ai été bon dernier de la course pendant au moins les deux premières heures. Mon seul objectif était de me rendre à destination. Tranquillement, de temps en temps, je dépassais un concurrent ou une concurrente retardataire. Finalement je touchais la plage de Ste-Luce sur mer à 15h11. J'étais content et impressioné d'avoir atteint mon but sans rencontrer de problème majeur. J'étais classé vingtième sur 27 concurrents au départ dans ma classe, très satisfaisant compte tenu des 82.6 km parcourus durant les deux jours précédant la course.
Une bonne nuit de sommeil et le lendemain, je repartais en voiture avec mon kayak sur le toit jusqu'à Montréal, complétant ainsi une autre belle expédition.